Biochar

Contexte, définition et périmètre

La force de la filière bois énergie est de s’appuyer sur :

  • Des intrants combustibles locaux et d’origines variées : déchets verts, bocage agricole et autres agro-combustibles, forêt et arbre hors forêt de manière générale. D’autres produits plus marginaux méritent d’intégrer cette réflexion : les produits issus de l’entretien des bords de route et d’ouverture de milieu, les Taillis de Saule à (très) Courte rotation (TtCR). Les volumes de combustibles bois déchiqueté consommés (470 000 T/an) en chaufferie et pour le paillage des plantations sont toujours inférieurs aux gisements régionaux.
  • Ces intrants peuvent être source de coproduits : fraction fine des plaquettes de bois issues des refus de crible qui n’ont pas de réelle voie de valorisation (sous couche litière et logettes éventuellement, et paillage).
  • Des technologies en phase de développement comme la pyrogazéification qui ne sont pas toujours connues, permettant à la fois de produire de la chaleur, mais aussi dans certaines conditions d’autres vecteurs énergétiques (gaz, électricité, hydrogène)

Ces technologies peuvent produire des coproduits valorisables : biochar (fraction solide), biohuile (fraction liquide). La proportion de chaque produit gaz/solide/huile varie selon la technologie (temps de séjour et taux d’oxygène) mais aussi de la qualité des intrants (essence, humidité, granulométrie).

Répartition des produits issus du procédé de pyro-gazéification

Les modèles de développement sont théoriquement nombreux et des exemples probants existent et gagneraient à être diffusés en Bretagne.

Réputé efficace mais coûteux pour bloquer par adsorption des éléments dissous lors du traitement final de l’eau, l’air, les gaz, la majorité du charbon actif est importé et provient d’Asie, des États-Unis et d’Afrique via des sociétés basées en Europe. Une réflexion est donc entamée pour (re)localiser cette production en s’appuyant sur la filière bois énergie existante. Le sujet du biochar est porté au niveau mondial par l’IBI (International Biochar Initiative) et en Europe par l’EBC (European Biochar Certification). Les instituts de recherche Ithaka (AL), Agroscope  (CH) et Biopterre (CA)

Les utilisateurs de charbon actif sont nombreux et variés, certains sont également détenteurs de biomasse (pyrolysable) et où la réflexion peut plus facilement s’amorcer vers une logique d’économie circulaire. Ont notamment été identifiés des acteurs du traitement de l’eau/assainissement et du REUSE

  • des odeurs en stations d’épurations urbaines,
  • de l’eau potable : station de pompage et de traitement (collectivités),
  • d’eaux usées : lagune collectant des lixiviats (industriels).
  • eau de piscine par ozonation
  • aquariophilie

et d’autres impliqués dans la filière thermochimique

  • agriculteurs méthaniseurs et opérateurs/exploitants de station d’épuration équipés d’unités de méthanisation : traitement biogaz avant injection/cogénération,
  • incinérateurs : traitement des fumées,
  • station de compostage et co-compostage de déchets verts : traitements des odeurs.

Les projets dans l’ouest

En Bretagne cette thématique n’a pas ou peu fait l’objet d’investigation. De 2017 à 2019 AILE a participé au programme de développement Inter-Reg Re-Direct (lien vers le programme R&D Re-Direct) en s’associant en France à Kerval Centre Armor : ce temps fort a permis de découvrir le marché du biochar et de caractériser des produits transformés à partir de matières végétales (fines de bois issues de criblage, TtCR, fractions ligneuses de déchets verts, biomasse issue de l’ouverture de milieux naturelles, etc…). La production de biochar à partir de matière organique animale (fraction sèche de lisier/digestat) et humaine (boue d’épuration) a été envisagée, mais pas testée dans ce programme.

Les assises nationales de la pyrogazéification à Locminé et à Nantes les 25 et 26 Septembre 2018 ainsi que le salon Bio360 lors de la séquence Regen Europe à Rennes en Janvier 2019 et à Nantes en Janvier 2020, notamment les conférences, ont permi aux porteurs de projets de tout l’ouest de la France de s’informer et d’échanger sur le thème du biochar.

Des unités de pyrogazéification apparaissent ponctuellement en Bretagne mais il existe très peu de retours d’expérience : projet de production de fertilisants sur la plateforme Liger à Locminé, Kerval Centre Armor s’est doté d’un pilote Naoden de gazéification. Une station d’épuration bretonne connectée à un hôpital a également testé en 2018 l’adsorption de résidus médicamenteux (actuellement peu ou pas traités et difficilement décelables) sur des filtres à charbon actif du commerce. Ces molécules indésirables, de même que les biocides et autres pesticides sont potentiellement présentes dans ces eaux qui seront ensuite restituées au milieu naturel et peuvent faire l’objet d’un pompage et d’un traitement de potabilisation avant d’être redistribuées au consommateur. Ces molécules ne font cependant pas aujourd’hui l’objet d’une réglementation particulière en France mais des travaux à ce sujet sont en cours en Suisse.

Matières dans les mains

Les pistes de développement

Le programme Three-C (2020-2022) a été validé et démarre en 2020. Les premières actions de Three C consisteront au préalable à réactiver les contacts issus de Re-Direct (2017-2019) pour identifier les besoins de traitement (molécules cibles) des utilisateurs de filtres à charbon actif (industriels, collectivités), tester au laboratoire des biochars produits localement sur diverses applications :

  • existantes (eau, biogaz, odeurs) et d’autres nombreuses applications 
  • en devenir (litière/agronomie, incorporation méthanisation/effluents/ disgestats/compost/boues de stations d’épuration, phytoépuration, biofiltre pour le traitement des odeurs,etc…).

en parallèle, communiquer et continuer à sensibiliser de nouveaux acteurs intéressés par le sujet du biochar et les scénarios envisageables et à co-construire dans les territoires bretons.

Carte des scénarios et synergies présumées en Bretagne pendant Re-Direct (2017-2019)

La mise en place d’une offre de service devra permettre d’accompagner, par territoire stratégique, la réflexion de développer la filière thermochimique pour produire des vecteurs énergétiques variés (mix) et complémentaires gaz/hydrogène/électricité, tout en produisant de la chaleur fatale, et des matériaux biosourcés de type biochar ou charbon actif à haute valeur ajoutée (pour l’environnement). La synergie des besoins d’acteurs complémentaires (offre/demande) sera envisagée dans un objectif d’économie circulaire équitablement rémunératrice pour l’ensemble des parties prenantes. 

L’anticipation des éventuelles évolutions de la réglementation (baisse des seuils de détection) dans les pratiques de gestion des eaux usées et des pollutions diffuses à l’échelle des bassins versants visant une filière de traitement de l’eau pourra constituer un levier de développement du biochar. Dans un objectif de bien commun à préserver et de transversalité, il est envisageable de :

  • se prémunir pour éviter de subir les obligations réglementaires laissant peu de temps d’organisation et se voir dicter des obligations de résultats et éventuellement de moyens,
  • créer de la valeur ajoutée économique et sociale non-délocalisable et de la cohérence dans les actions des territoires dans le domaine de l’eau.

Le développement d’unités de séchage à la ferme utilisant de la chaleur renouvelable pourra constituer un levier technique et organisationnel dans le développement de cette chaîne de valeur.

Ressources disponibles
Rapport Three-C sur le biochar 1,04 Mo
Note technique de Bioterre au Canada7,85 Mo